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Lazarius et l'antiquaire – Chapitre 1

Lazarius et l'antiquaire - Chapitre 1



Dans une de mes histoires précédentes, Lazarius rencontre Eva Deline, au chapitre 3, au moment où je raconte que je vais utiliser ma plus belle strappe, jévoque une anecdote, celle de lachat de cette strappe : « () belle lanière de cuir souple, de 6 cm de large sur 45 cm de long.

Je lui fis humer lodeur enivrante, lui caressai le visage avec, la fis passer sous son menton et la naissance de son cou.

« – Celle-ci est ma préférée : elle est plus large et plus souple quune ceinture, se déploie à grande vitesse comme un serpent sur les fesses des insolentes et des rebelles avec un sifflement et un claquement émouvants.

Elle a tanné le cul de femmes de tout âge ; je lai trouvée chez une antiquaire, une grosse femme blonde qui a tenu à ce que je lessaie sur elle.

Cet objet a, paraît-il, plus de cent ans et a été parfaitement entretenu.

Sentez son cuir, imaginez le nombre de fessiers volages et pervertis quelle a marqués, probablement des femmes du monde à qui on aurait donné, en les croisant dans la rue, le bon dieu sans confession. »

Je vais vous raconter cet épisode aujourdhui.

Dans ce monde devenu un monde peuplé quasi-exclusivement de femmes (les hommes ayant presque tous disparu : voir les chapitres précédents de Lazarius), au début, je nosais plus beaucoup sortir, comme je lai déjà raconté.

Puis, ne pouvant rester terré chez moi, me revêtant parfois de joggings à capuche, je descendais jusquà une porte de Paris, puis je prenais le métro, comme avant.

A cette époque, mon petit business commençait à me rapporter pas mal et je venais dacheter une grande maison cossue dans un coin tranquille de ma banlieue Est. Cette maison était vraiment très grande et je navais pas fini de la meubler.

Je nétais pas trop pressé, et javais pris lhabitude de flâner, à mes heures perdues, dans la capitale.

Il y a des quartiers que jaime particulièrement. Jaime bien me balader le long du canal Saint Martin, remonter de la place de la Bastille jusquà la Villette, marcher jusquà la Cité des Sciences.

Jai toujours aimé, depuis que je me promène dans Paris, le quartier de la Bastille et ses rues avoisinantes, tellement vivantes, comme la rue de la Roquette qui monte jusquà Belleville et au Père Lachaise (rue que jai maintes fois montée en vélo), la rue du Faubourg du Temple, jadis domaine des antiquaires, mais qui a un peu périclité, et encore plus depuis quil ny a quasiment plus dhommes.

Jallai ce jour-là, un peu au hasard, mais avec la vague intention de faire quelques vitrines, et de voir sil restait encore quelques boutiques dantiquités.

Non pas que je cherchasse des meubles (jai toujours préféré le neuf, et les styles originaux et exotiques), mais je me disais que je pourrais éventuellement trouver un bureau intéressant ou, étant donné que je suis branché s.m., peut-être, si javais de la chance, un meuble ancien que je pourrais utiliser ou détourner de son usage pour des pratiques coquines.

Je marrêtai devant la vitrine dun de ces magasins il en restait donc quelques-uns, peu éloignés les uns des autres – une petite boutique, où beaucoup dobjets semblaient un peu entassés.

Plusieurs fauteuils, des psychés, quelques guéridons, des vieux pots, pas grand-chose dintéressant pour moi, mais je me décidai à entrer afin de voir si la propriétaire navait pas autre chose, une table basse, voire des petits objets.

« – Bonjour Monsieur » maccueillit la patronne à mon entrée. Elle ne semblait pas trop surprise de voir un homme, contrairement à ce à quoi jaurais pu mattendre.

Elle était derrière ce qui lui servait de comptoir, un meuble qui ressemblait plus à un bar ou à un buffet assez haut.

« – Bonjour, Madame. »

Je regardai çà et là, furetai de part et dautre, levai les yeux : javais vite fait le tour, il y avait, comme je my attendais, surtout des vieilleries et du mobilier dune époque qui ne mintéressait guère.

« – Je peux vous aider ? Vous cherchez quelque chose en particulier ? » Elle sortit de derrière son comptoir, cétait une femme assez petite, un peu trapue, blonde, cinquante-cinq à soixante ans, un peu ronde au corps légèrement massif.

« – Euh non. Enfin, je regarde » Puis après un temps dhésitation, sachant davance que ma recherche allait être vaine, jajoutai : « je suis un peu collectionneur Jaime les objets curieux, insolites des objets anciens, qui pourraient me servir de décoration.

— Quelle sorte dobjets ?

— Tout enfin tout ce qui pourrait être décoratif, en bois, en métal, de la matière noble des petits objets que je pourrai entreposer çà et là sur mes meubles jai beaucoup de place et intriguer mes visiteuses, par exemple

— Hum » dit-elle, « cest assez vague Je nai pas beaucoup dobjets rares, jen ai peur.

— Tout ce que vous avez est là ? Vous navez rien dautre ?

— Non jai dautres choses entreposées Mais je réfléchis à ce qui pourrait vous intéresser Jai bien un vieux sextant de marine, mais il nest pas en très bon état. Il faut que je le fasse restaurer

— Je ne suis pas très fan dobjets de marine.

— Quel type dobjets vous intéresserait ? » me demanda-t-elle dun air intrigué.

— Je ne sais pas, vous navez rien de vraiment insolite ? Je veux dire, de rare, de curieux ?

— Eh bien ici non, » réfléchit-elle, lair songeur

— Mais encore ? » lui répondis-je dun air amusé et intrigué par ce pseudo-mystère ; mais la dame restait très sérieuse.

— Non, je pensais Jai quelques objets entreposés dans un autre endroit Mais je ne sais pas si vous trouveriez quelque chose dintéressant.

— Et ce serait possible de les voir ? Vous pourriez les rapporter ?

— Eh bien, ils sont loin, dans une dépendance de ma maison de campagne. Mais cest loin, dans le pays dAuge, et je ny vais pas souvent en ce moment Et il y a beaucoup de bric-à-brac.

— Cest bien dommage. Ecoutez, je ne suis pas pressé. Et je suis prêt à me déplacer sil le faut.

— Il y a plus de deux-cents kilomètres, vous savez, et je ne me souviens plus très bien tout ce quil y a ; si ça trouve, pas grand-chose, et je men voudrais de vous faire faire toute cette route pour rien.

— Oui bien-sûr, je comprends. »

Je comprenais surtout que cette dame navait aucune envie de minviter à venir chez elle, dans sa maison de campagne, où, si ça se trouve, elle ne se rendait que très rarement. Dautant que nous étions en hiver, et que les Parisiens aiment bien profiter de la campagne aux beaux jours, quand la chaleur et le soleil sont au rendez-vous.

Elle navait pas envie, elle non plus, de faire quatre-cents kilomètres aller-retour juste pour farfouiller dans de la poussière sans doute accumulée depuis des années, surtout pour ne rien dénicher qui mintéresse et en définitive, ne rien gagner.

Voulant lui montrer que je lisais dans ses pensées je lui déclarai :

« – Je comprends bien. Vous nallez sans doute pas là-bas tous les week-ends et vous navez pas envie dy aller juste pour remuer un bric-à-brac qui, en définitive, ne mintéressera peut-être pas.

Et bien écoutez » enchaînai-je, « je vous donne ma carte de visite, il y a mon mail et mon téléphone. Si un jour vous allez là-bas, vous mappelez, vous me dites ce que vous avez trouvé (puisque vous ne vous souvenez pas bien ce quil y a et dans quel état sont ces choses), et puis on avisera : si cest susceptible de mintéresser je vous le dirai et vous les ramènerez sur Paris »

La dame blonde prit ma carte de visite avec étonnement. Quun homme donne ainsi ses coordonnées cétait devenu tellement rare.

Bon, javoue que cest un numéro spécial et pas mon numéro personnel (que je ne donne pas aussi facilement.)

Et jajoutai, limite avec un clin dil qui se voulait complice :

« – Mais si vous voulez, parce que vous devez rester quelques jours là-bas, que je me déplace, et si je suis disponible, nhésitez pas à men parler.

Au-revoir et bonne journée !

— Au revoir » répondit-elle, mais elle était restée figée, ma carte de visite entre ses doigts.

Je tournai les talons et je sortis.

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