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To be or not to be – Chapitre 1

To be or not to be - Chapitre 1



Navez-vous jamais eu limpression de ne plus être maitre de votre destin, de vos choix, de vos actions ? Limpression de nêtre quune simple marionnette, le jouet dautres personnes, ou pire dun Dieu taquin ?

Non ?

Moi, si ! Et le pire, cest que je ne me suis rendu compte de rien. Du moins, pas au début.

.oOo.

Jai toujours été dune grande timidité, maladive, presque pathologique. Lidée dentrer dans un lieu public memplissait dangoisse. Et si lors dune fête de famille, il y avait une sono, alors je cherchais toutes les excuses possibles pour ne pas danser.

Et en grandissant, les choses ne sarrangèrent pas. Cette situation inquiétait sérieusement mes parents qui un temps songèrent à menvoyer chez un psy. Mais le tarif les en dissuadèrent. Cest lors dune discussion avec je ne sais plus qui, que maman tenta le tout pour le tout.

— Thomas, tu peux venir avec moi ? demanda-t-elle.

On était un mercredi. Sur le moment, je pensais quon allait faire des courses. Un des rares lieux publics qui ne me gênait pas car toutes ces ménagères étaient plus attachées à remplir leur caddy quà soccuper de moi.

Mais la route que prit maman nétait pas celle du centre commercial.

— Où on va ? demandé-je.

— Tu verras, cest une surprise.

Maman se gara, puis on marcha jusquà un bâtiment dont je neus pas le temps de lire les plaques rivées à lentrée. On entra enfin dans une salle occupée par plusieurs personnes. Des ados comme moi, garçons et filles et un homme plus âgé.

Evidemment, toutes les têtes se tournèrent vers nous et mes phobies reprirent le dessus.

— Bonjour Madame, dit lhomme en savançant vers nous. Cest vous que jai eu au téléphone ?

— Oui. Je vous amène mon fils, Thomas. Peut-être arriverez-vous à quelque chose.

— On va essayer, dit-il. On va essayer.

— A tout à lheure Thom.

Et avant que je ne pus dire quoi que ce soit, maman me laissa seul au milieu de ces gens que je ne connaissais pas et qui me regardaient comme une bête de foire. Du moins, cest limpression que jen avais.

— Viens, dit lhomme, je vais te présenter. Moi, cest Pierre et je suis professeur de théâtre.

Je cru que mon cur allait sarrêter net. Mais Pierre qui me tenait par le bras mamena on centre de la salle. Il me présenta à chacun des élèves, qui maccueillirent chaleureusement.

— Timide ? me demanda lune dentre eux.

Je ne répondis pas, me contentant de rougir comme une pivoine.

— Ne ten fait pas, continua-t-elle. Tu vas voir, tout va bien se passer.

Cette première séance commença doucement car je ne fus que spectateur. Maman arriva à la fin, dit au revoir à tout le monde en donnant rendez-vous pour la semaine prochaine.

— Mais je ne veux pas revenir, me lamenté-je.

— Pourtant, il va le falloir. Jai payé la cotisation jusquà la fin de lannée. Et je ne serai pas remboursée. Essaye au moins, avant de dire « jaime pas ».

Je fus encore spectateur pendant les trois cours qui suivirent. Mais jamais je ne restai dans mon coin. Autant Pierre que les élèves ne cessaient de me parler ou de commenter ce quils faisaient. Puis vint mon tour de monter sur scène. Enfin, déjà en soi, monter sur scène était du théâtre car il fallait limaginer dans cette salle de réunion occupée seulement par des chaises et quelques tables.

Tout était fait pour me mettre en confiance, mencourager sans jamais se moquer ou encore moins critiquer. Et le miracle se produisit. Petit à petit, le théâtre noya ma timidité sous le flot du jeu dacteur. Je nétais plus tout seul perdu au milieu de tous. Je faisais partie du tout. Mon rôle, aussi minime fut-il, avait son importance. Au même titre que le décor et les costumes. Sans moi, la pièce perdait de son attrait, de son sens. Un peu comme le ciment lie les briques entre elles. Dès que je compris ça, le théâtre devint une passion puis une obsession.

Mes névroses quittèrent la douce chaleur de ma timidité pour sinstaller dans la maison cossue de la comédie.

Grâce au théâtre, je nétais plus moi. Je pouvais être nimporte qui et qui je voulais. Du bourgeois gentilhomme au malade imaginaire, un grand roi grec prêt à livrer bataille, capable de sacrifier sa fille pour arriver à ses fins, dêtre un soldat rimailleur affublé dun grand nez, dêtre un gentil, un méchant. En jouant un rôle, ce nétait plus moi qui mexprimais mais mon personnage. Lui seul pouvait déclarer sa flamme à sa dulcinée, ou vomir sa haine sur le monde. Chose que jétais incapable de faire une fois descendu des planches.

Et tout naturellement, mes études jusqualors axées sur les maths et la physique firent un virage brutal vers la littérature. Je navais plus quun seul rêve : devenir comédien.

Une fois le bac en poche, jentrai dans un cursus de théâtre à luniversité tout en continuant de jouer, avec Pierre comme professeur.

Ce ne fut quen deuxième année que je pus enfin intégrer une école de théâtre.

Cest là que je fis la connaissance de Marianne, Fabien et Chloé. Je me rapprochai très vite du trio et ils devinrent mes meilleurs amis. On étudiait ensemble, on répétait, on se donnait la réplique. Mais notre amitié sarrêtait là. On était juste une bande de potes mais jamais il ne fut question dautre chose. Et même si on parlait parfois souvent de sexe et de cul, on navait jamais envisagé de passer à lacte entre nous. Dailleurs Cloé et Marianne avait chacune un copain plus ou moins régulier, même si elles passaient moins de temps avec eux quavec nous.

On continuait nos cours tout en écumant les castings dans lespoir de trouver quelques rôles, qui a défaut de nous faire vivre, nous mettraient le pied à létrier.

— Jai une proposition à vous faire, dis-je un jour.

— Et alors, Thom ! On se lâche ? plaisanta Marianne.

— Mais non, cest pas ça, banane ! Est-ce que ça vous dirai de jouer une pièce, pour de vrai, devant un public.

— Ça y est, il se prend pour Patrice Chéreau ! Ca va les chevilles ?

— Vous nêtes pas drôles ! dis-je dépité.

— Et on va jouer quoi ?

Je levai et allai chercher des livrets sommairement reliés que je distribuai à mes amis.

— « Amères obsessions », tout un programme, railla Chloé.

— Je vous laisse lire et vous me dites ce que vous en pensez.

— Qui est lauteur ? demanda Fabien.

Je marquai un silence.

— Moi, dis-je timidement

— Toi ? sexclama Fabien, vraiment étonné.

— Oui, moi. Jai osé. Mais lisez-là dabord. On en reparle après.

Jai attendu presquun mois avant davoir les commentaires de mes amis sur ce drame qui se déroulait sur un bateau de croisière.

— Pas trop mal, dit Marianne. Peut-être quil y a quelque retouche à faire. Mais cest pas mal.

— Tout à fait daccord, enchérit Chloé. Tu mépates.

— Jaurai pu lécrire aussi, dit Fabien.

Mais connaissant lintéressé, je savais que cette remarque qui pouvait paraitre désobligeante cachait un compliment.

— Et on répète quand et comment ? demanda Chloé car avec les cours, les castings, ça va pas être facile.

A part moi qui était convaincu de percer dans le métier dacteur et de voir un jour mon nom en haut de laffiche, tous suivaient des cours par correspondance, histoire de davoir une porte de sortie et ne pas rester enfermé dans le statut dintermittent du spectacle.

— Et pour le budget ? demanda Chloé. Parce que même si on rogne sur le décor, il faudra quand même un budget. A moins que tu ais repêché lépave du Titanic.

— Très drôle. Tu devrais te lancer dans le stand-up. Pour le budget, je pensais ouvrir une souscription par crowfunding.

— Et tu crois quil y va y avoir des gogos qui vont payer pour une pièce de théâtre même pas drôle ? tailla Marianne.

— Ça coute rien dessayer, rétorqué-je, convaincu de mon affaire.

Le silence se fit.

— Bon, écoute, dit Marianne. On va te suivre dans ton délire parce que ça à lair dêtre vachement important pour toi. Mais si on se réserve le droit de quitter le navire si on sent quil va couler.

La métaphore était joliment trouvée. Mais elle me plaisait bien. Une raison supplémentaire de motivation.

Jouvris rapidement la demande de souscription. Juste deux mille euros. Mais malgré tout, ils furent quelques-uns, anonymes ou de la famille, à répondre à mon appel et le budget fut quasiment bouclé. Parallèlement, je créai une page Facebook qui serait le témoin de notre aventure et qui montrerait à mes généreux mécènes lavancée du projet et de de leur investissement.

La pièce était un huis-clos qui se passait sur un navire de croisière. Un couple, joué par Marianne et Fabien, était là en voyage de noce. Voyage qui tournera au drame avec larrivée dune femme Chloé qui, larguée par son copain juste avant lembarquement, va compenser son chagrin en jetant son dévolu sur Fabien. Evidemment, ce triangle amoureux finira tragiquement. Les histoires damour finissent toujours mal.

Quant à moi, je moccupai de la mise en scène. Un nouveau rôle dans lequel je tenais absolument à me lancer. Les premières répétitions se passèrent pour le mieux. Mes amis jouaient leur rôle et acceptaient mes directives, sen amusant parfois ou me corrigeant si quelque chose nallait pas.

Tout se passait bien. Jusquau drame.

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