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A.D.D.C. – Chapitre 3

A.D.D.C. - Chapitre 3



A.D.D.C. 3

Le lendemain matin.

— Alors, mon amour ton envie de break est passée. Tu mas fait lamour de façon merveilleuse. Il ny a rien de tel quune réconciliation sur loreiller.

— Cétait mieux que les autres fois ?

— Formidable. Mais tu as fait des dégâts : mon vagin est enflammé. Je tadore.

— Ce sera un point de référence si un jour tu veux établir une comparaison.

— Jamais, idiot, je taime trop. Bois vite ton café, nous allons arriver en retard au travail.

Lili part vers sa grande surface, je fais semblant de partir au bureau. Jachète le quotidien local. Dans les petites annonces je découvre deux studios à louer. Je visite le premier, moins cher; il est trop éloigné de mon travail et de mon domicile. Par chance le second vient juste de se libérer. Quand jannonce au propriétaire que je ne louerai que pour un mois, il fait la grimace. Mais faute de concurrence il me fait une fleur à condition de pouvoir faire visiter les lieux pendant ce mois. Ce studio présente lavantage dêtre situé à proximité du local de lA.D.D.C. De ma fenêtre sur rue jaurai vue sur lentrée de lassociation. Que rêver de mieux ?

Dans la foulée je retourne chez moi, je jette dans une valise le nécessaire pour le mois et je laisse un mot à Lili. Je la prie de vivre ces quatre semaines sans me chercher, libre de ses mouvements. Quelle profite de sa liberté pour étudier la possibilité dune vie avec Robert ou un autre homme. Quelle ne se sente pas coupable si ses promesses passées et ses engagements antérieurs seffondrent devant lévidence dun autre amour. Car tel est le but de cette pause : faire le point et réorienter sa vie si cela simpose. Je la remercie pour le bonheur quelle ma donné jusquà ce baiser qui est à lorigine de ma décision de retrait temporaire. Je lui souhaite dêtre heureuse, quelle que soit la décision quelle prendra à la fin de cette expérience. Volontairement je ne lui dis rien de mon amour : je ne veux pas la lier à moi par une déclaration qui ressemblerait à une cage dont elle se croirait prisonnière à vie. Je déménage, je peux reprendre mon travail. Jai le cur brisé, je prends un gros risque. On verra.

De ma fenêtre je guette son arrivée au club des déshérités. Par la porte nentrent que des hommes. Par où entrent les femmes ? Lili se présente avec un quart dheure de retard à vive allure. Jai failli ne pas la reconnaître. Elle a enfilé un jeans et un pull. Cest une tenue inhabituelle, elle a toujours préféré les jupes ou les robes. Se protège-t-elle des mains baladeuses de Robert ? Les habitués arrivent peu à peu, avec une désinvolture affichée. Sortants et retardataires se croisent, ils jouent lindifférence. Deux heures plus tard Robert et Lili quittent les lieux. Robert la raccompagne jusquà ce renfoncement sombre. Il tente un bisou sur la joue. Lili lui tend la main. Elle le tient à lécart, on ne pourra pas laccuser de flirter. Elle séloigne.

Pendant une huitaine jassiste à la répétition de la même scène. Lili est sage. Trop sage dans la rue. Avec une barbe de dix jours, en bleu de travail et une casquette vissée sur la tête, je visite le local de la soupe et du vin. Ce soir je mappelle Maurice ou Momo pour les amis. Paul ne ma pas reconnu, a oublié de me demander des papiers. A la douche préside une inconnue. Je traîne sous leau, je jette un il du côté dames: il ny a personne sous la douche. La porte de séparation entre cette douche et le quartier des femmes est entrouverte. Je fais le curieux. La salle est symétrique à celle des hommes, cest un couloir peu large et jy remarque les mêmes box séparés par des planches. Lili est debout dos au mur et surveille peu de monde. Je ne dénombre que deux dames actives aux fesses voilées qui débordent de la limite des séparations.

Quelquun frappe sur mon épaule

— Cest toi le nouveau ? Tu te trompes de porte.

— Aoh ! Pardon

— Comment tappelles-tu ?

— Maurice.

— Eh bien, Maurice, tu vas prendre lautre porte.

Comme Paul, Robert ne me reconnaît pas. Je suis la consigne et je passe chez les hommes. Face au mur ils sont cinq. Deux sont occupés, collés à la paroi. Trois patientent et entretiennent leur érection, ils se masturbent et regardent le plafond.

— Ho, il ny a personne ce soir ? Grogne lun des trois.

Je traverse discrètement dans leur dos, jatteins la porte vitrée du fond : elle souvre et je me retrouve dans un passage de deux mètres sur un. Une porte vitrée donne sur la salle des femmes. Une tête dépasse des séparations, plus loin une bonne grosse au ventre volumineux retire sa culotte et marche à reculons vers le trou. Elle se tient aux planches. Jentends des protestations. Robert et Lili discutent, lair ennuyé et tout à coup se dirigent vers les box. Lili occupe le dernier, limité à sa droite mais sans cache de mon côté. Pourvu quelle ne se tourne pas vers moi. Jessaie les clenches des deux portes situées dans mon dos : elles sont fermées à clé. Je ne laisse dépasser quun il pour observer ma femme. Toujours habillée, elle prend en main ce qui dépasse dune verge. Elle promène délicatement deux doigts sur le dos du membre à plusieurs reprises. Lengin prend de limportance. Elle porte sa main à hauteur de sa bouche, y crache de la salive et ressaisit la queue des deux mains, la sèche tient la chose près du trou, lautre mouille le gland et entreprend le va et vient rituel. Faute de combattante, Lili se dévoue et masturbe vaillamment le sexe de lhomme. Je ne vois pas ce que fait Robert, mais il y a fort à parier que lui aussi se livre aux mêmes travaux manuels sur la bite dun pauvre diable qui se croit manipulé par une femme à poigne. Les distributeurs de chaleur humaine mettent donc la main à la pâte lorsquil y a pénurie de participantes. Lili change de main, la gauche est aussi agile que la droite. Jai souvent admiré son savoir faire lorsquelle moffrait des préliminaires. Je connais maintenant la cause de son habileté ; elle a des occasions nombreuses de sentraîner. Elle a oublié de me parler de cette activité. Serait-ce ça son « don de soi. » Ou se donne-t-elle plus ?

Mettre la main à la pâte. Passe encore. Le type ne sen contente pas. En hochant la tête, Lili saccroupit et linimaginable se produit : elle lubrifie le gland dun nouveau jet de salive, tient la base du manche et dépose un bisou sur lextrémité. La main reprend laller retour et la bouche souffle sur le méat. La tête avance, les lèvres forment un anneau sur la chair dégagée du prépuce par les doigts de fée. La fellation peut faire partie des attributions occasionnelles de la dirigeante. Je ne saurai pas si elle peut pousser le don de soi jusquà affronter le sexe masculin avec sa chatte, car le bonhomme branlé et sucé par ma femme généreuse se laisse aller. Lili fait un bond en arrière, se relève mais ne lâche pas le tube lance sperme dont elle dirige les jets vers le sol. Elle le caresse longuement, il se vide, perd quelques gouttes. Lili le libère, cherche dans sa poche un mouchoir en papier et sessuie la bouche. Elle se redresse, examine son pull et son pantalon. Elle se tourne vers les autres box. Robert, toujours droit lappelle au secours pour achever son client. Elle fait non de la main. Il insiste, elle se dirige vers le gars, Robert passe au box suivant et se crache dans les mains. Je ne vois plus que le jeans de Lili penchée. Elle aura mal aux mâchoires si elle continue. Les deux autres femmes ont fait demi-tour et recommencent avec de nouvelles queues. Je resterais bien pour voir ce qui peut se passer entre Robert et Lili. Mais je ne tiens pas à être enfermé dans le bâtiment. Je rebrousse chemin. A Paul je déclare:

— Oui, cest formidable, je reviendrai.

— Salut Momo.

Le don de soi, la chaleur humaine : désormais je sais. Finalement cette paroi trouée permet de soulager sans sattacher au bénéficiaire. Les sexes ne sont pas absolument anonymes. Avec lhabitude les mains au toucher ou la bouche au diamètre, aux formes et aux saveurs doivent établir des portraits ou des cartes didentités des bites quon leur soumet. Mais jai relevé quà la sortie les individus se dispersent rapidement, je nai pas constaté la formation de couples en dehors de celui de Lili et Robert.

Ce soir encore, de mon observatoire, jassiste à leur sortie. Ils discutent debout sous le lampadaire.

La discussion est animée. A mon étonnement ils prennent la direction de notre immeuble. Ils se sont échauffés en servant leurs patients, vont-ils terminer la nuit ensemble. Je les suis. Ils entrent, jattends un peu. Il faut leur laisser le temps de se mettre à poil et de se coucher pour passer aux constatations.

Le barillet Bricard offre lavantage douvrir la porte de lextérieur même si loccupant a laissé sa clé sur la serrure à lintérieur. Pour le moment je fais le tour du bâtiment. Entre les lames du volet du salon filtre des rais de lumière. Pas de lampe allumée dans les deux chambres. A larrière la fenêtre de la cuisine est éclairée. Lili prépare un repas. Elle éteint. Ils mangeront ensemble. Voilà les prémices dune relation sexuelle prochaine : on reprend des forces avant daller au lit.

La situation me chagrine. Quelques jours dabstinence auront eu raison de lindéfectible amour de Lili pour moi. Ce nest pas un hasard. La faille existait, le baiser et les caresses sur le trottoir en étaient le signe ou si je préfère la fumée qui annonçait le feu de ce soir. Ils se sont préparés sur les mâles de lassociation, le sang bout dans leurs veines. Il est temps dentrer discrètement pour assister à la concrétisation de leur attirance. La clé tourne, la porte me laisse pénétrer dans le vestibule. Le téléviseur diffuse de la musique dun film et couvre mon bruit. Le peu de lumière qui passe par lentrebâillement de la porte du salon me permet de remarquer que la porte de la penderie est ouverte : je pourrai my cacher si nécessaire. Javance sur la pointe des pieds et je fais le voyeur.

— Alors Lili, il faut recruter des femmes. Sinon les gaillards ne viendront plus.

— Evidemment. Nous naurons plus la subvention pour la nourriture et la boisson si nos pauvres hommes ne trouvent plus leur plaisir et délaissent la soupe. Et je ne vais pas faire tous les soirs la pompe à sperme. Une fois passe de temps en temps, mais je ne veux pas être en permanence devant les trous à secouer des verges. Hélas nous navons pas le droit de faire de la publicité pour la sexualité. Pourtant il y a certainement autant de femmes que dhommes dans le besoin de se faire du bien.

— Moi non plus, je ne peux pas continuer à masturber des gars. Ca me fait tout drôle de branler une queue dhomme qui dépasse de lorifice. Tu es plus douée que moi. Dailleurs je naurais pas pu achever les hommes comme toi avec la bouche. Tu tes montrée à la hauteur. Une fois dans ta bouche les cinq gaillards ont craché leur semence bien vite. En as-tu avalé ? Tu aimes ça ?

— Moque-toi de moi ! Ou tu distribues des préservatifs et tu rends le port de la capote obligatoire ou je refuse toute participation. Trouve des préservatifs parfumés. La saveur fera oublier ce quon suce.

— Ma femme men a déjà parlé. Elle connaît une adresse. Je vais mendier une subvention. Tu sais vraiment y faire avec la bouche. Ton André est un veinard avec une turluteuse de ton niveau. On voit la pratiquante. Et sils avaient réclamé un rapport complet, tu aurais présenté ton sexe ou ton joli petit troufignon ?

— Oh! Robert, tu es fou. Bien sûr ça taurait amusé. Tu aimerais voir ma chatte ou mon trou du cul. Tu rêves mon ami. Jamais. Cest pour André : terrain privé, défense dentrer.

— Allons, réfléchis. Tu y as mis les doigts et les lèvres, pourquoi pas le reste ? En cette période de pénurie, sauve notre association. Personne ne le saura ! Les demandeurs ne cherchent pas à savoir qui ils baisent. Derrière la paroi ils ne peuvent pas savoir. Pourvu que la cramouille soit chaude et serrée, ils sont contents. De plus il y aura des préservatifs et si tu lexiges je quitterai la salle. Toi-même tu pourrais y trouver ton compte.

— Combien de fois devrai-je le répéter : Je ne suis pas en manque. Jai un homme comme tu as ta femme. Si nous navons plus de femmes que ça démange, il faudra se rendre à lévidence, nous fermerons.

— On devra recourir à des professionnelles.

— Avec quoi les payeras-tu ? Je suis bénévole dans une association caritative, je ne serai pas maquerelle dans un bordel.

— Voilà pourquoi tu dois te sacrifier pour relancer lactivité. Pense à tous ces malheureux auxquels il ne resterait plus que leurs cinq doigts pour se soulager. Pense aussi à notre rôle important dans la lutte contre le viol. Un type que tu vides de son foutre ne se jette pas sur la joggeuse isolée ou sur la gamine sans défense.

— Tu me ferais traire tous les mâles, tu en as de bonnes. Non, je ne marche pas. Ta femme serait-elle daccord.

— Cest un coup bas. Notre couple va mal. Ce nest pas le moment de lui offrir un poste pareil.

Lili a une main sur la table. Robert la regarde et pose sa patte dhomme dessus. Ils se taisent pendant quelques minutes, puis Robert se lance

— Ce que tu refuses aux autres, ne pourrais-tu pas me laccorder ? Ne sois pas intransigeante, je ten prie, aie pitié dun homme qui souffre et qui taime.

— Tu as vu lheure ? Tes enfants et ta femme tattendent. Naccumule pas les sujets de tension.

— Ma tension est dans mon pantalon. Ton repas était excellent. On pourrait continuer la discussion?

— Reviens demain soir si tu veux. Je veux penser à tout ça à tête reposée.

— Donc tu vas réfléchir, merci. .Parce que André sera encore absent demain ? Dis, tu es toujours avec lui, sûr ?

— Quelle question ! Allez, ne traîne pas. Bonsoir.

— Merci pour tout. Tu permets que je tembrasse.

Je quitte les lieux en vitesse. A lextérieur jattends au coin du bâtiment. Que font-ils ? Le baiser me paraît durer une éternité.

A suivre

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