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Tabatha… L'esclavagiste – Chapitre 10

Tabatha... L'esclavagiste - Chapitre 10



L’un des inconnus était resté muet tout le temps que Conan avait parlé. L’autre n’avait même pas tenté de répondre et s’était levé pour quitter la tablée.

Le guerrier après lui avoir ordonné de s’arrêter, le rattrapait quelques pas plus loin et d’une main ferme l’obligeait à se retourner pour lui faire face.

Un mouvement dans son dos, le bruit caractéristique de l’acier coulissant dans un fourreau et Conan comprit qu’il n’avait qu’un instant pour réagir.

Le colosse avait été rapide et il ne lui avait fallu qu’un mouvement du corps pour se retourner. Le deuxième homme avait bien dégainé une dague.

Il la tenait toujours mais restait immobile, bras ballants et yeux fixes. Thibault, la lame de son poignard sur la gorge de l’autre lui ordonnait de lâcher son arme. L’objet tomba et toucha la pierre du sol avec un bruit métallique.

D’autres bruit retentirent presque dans le même temps. Le corps propulsé du second larron s’écrasant sur le bois lourd d’une tablée délaissé de ses convives et renversant plats et coupes sales restées en place.

Un lourd silence pesait sur l’auberge et les clients se tenaient tranquilles. Deux guerriers qui se déchainaient contre des inconnus, cela ne regardait qu’eux, quelles qu’en soit les raisons.

Surtout, personne n’avait la moindre envie de mourir et ce même si ces deux voyageurs étaient innocents et les guerriers dans leurs torts. Mais il était extrêmement rare que des guerriers agissent sans bonnes raisons.

Il n’avait fallu que quelques coups et des menaces de les tuer séance tenante dans la cour de l’auberge pour que les deux hommes parlent.

Et la rage contenue mais bien voyante de Conan les rendit prolixes en détails.

Une caravane d’esclaves avait bien traversée une partie du royaume venant du Nord Ouest et bivouaquait dans une forêt au Nord-Est de l’auberge.

A quelques six lieues seulement.

Plus de deux centaines de femmes capturées dans des bourgs visités par les esclavagistes étaient détenues prisonnières et seraient vendues comme esclaves une fois l’Octroi quitté.

On pouvait compter une cinquantaine de gardes bien armés et des marchands.

Des espions et des éclaireurs très actifs se renseignaient sur la région qu’ils devraient traverser et traçaient la route pour les esclavagistes chaque jour. Les deux hommes racontaient ce qu’ils savaient, parlant tour à tour ou répondant aux questions de Conan en même temps.

Une jeune femme brune nommée Tabatha ? Parlez crapules ! J’espère pour vos vies qu’elle est vivante ! 

Ils la connaissaient Tout le monde connaissait cette femme.

Elle était vivante et Lugos le chef des esclavagistes en avait fait sa favorite. Tout le convoi savait qui était cette princesse qui avait combattu et vaincu des gardes dans une joute improvisée. Le bruit courait qu’elle était tombée malade après les joutes mais la femme s’était remise.

— Cette femme La princesse comme on l’appelle Elle est vivante seigneur Je le jure sur le dieu passeur !

Les deux personnages étaient morts de peur. Tous deux répétaient n’ayant évidemment rien à voir avec les esclavagistes et se servant du convoi comme d’une sécurité pour voyager.

L’un d’eux, son visage ingrat et chafouin ne plaidant pas pour lui, bredouillait sans cesse qu’il n’avait pas touché une seule des femmes.

— Nous le saurons vite ! Une femme désignant l’un de vous comme tortionnaire, acheteur ou pour l’avoir regardé de travers et je le tuerai moi-même.

Ils ne savaient pas quel serait l’itinéraire emprunté par les caravaniers pour rejoindre la frontière et les poings de Conan les assommant à demi ne lui apporta aucune autre information.

L’aubergiste ne refusa pas son aide et donna à Thibault une énorme clef de fer forgé. Un cellier muni d’une porte de bois massif servirait de geôle jusqu’à ce que Thibault puisse mener ces témoins jusqu’au Tregont. Ils n’étaient peut-être pas coupables de grand-chose. 

Pour le moment ils n’étaient que des témoins. Des lâches et des profiteurs mais ce n’était pas un crime.

Pour faire bonne mesure, les prisonniers furent dûment ligotés et bâillonnés puis les guerriers les abandonnèrent dans leur geôle improvisée.

Ils n’étaient pas d’accord sur le plan à suivre.

Conan prêchait pour l’urgence et un départ immédiat pour trouver cette caravane. Thibault lui, défendait la prudence. Partir de nuit sur des routes inconnues risquait de les faire s’égarer. Attendre le matin pour aller à la recherche du convoi était plus sûr. 

Quant à rejoindre le col d’Elnes directement, c’était pour le guerrier la meilleure des solutions.

— Maintenant que nous savons que cette caravane existe bel et bien, il est certain qu’elle passera la frontière par le col, Conan. Ils sont venus jusqu’ici et c’est l’unique route pour quitter le royaume. Réfléchis-y je t’en prie !

— Je peux partir avec la moitié du Tregont ! Sans attaquer dans un premier temps Surveiller leur départ et s’assurer qu’ils se déplacent vers le col.

— Ces types ont parlé d’espions ! D’éclaireurs ! Admettons qu’ils entendent parler de ta tentative, ou qu’ils vous voient Ils peuvent changer leurs plans de route, disparaitre un moment. Tout serait à refaire ! Quant à une attaque c’est la mort pour vous tous. Tu surestimes nos frères en les comparants à toi Conan ! Tous ne sont pas des combattants de ta trempe, loin s’en faut. Le Tregont dans son ensemble se battrait à un contre trois Et gagnerait certainement la bataille c’est vrai. Mais les pertes pourraient être lourdes pour nos frères Quant à partir avec la moitié des hommes, si les choses tournaient

Conan frappa le bois de la table du poing et lâcha un juron sonore.

— Tu as raison ! Mais attendre est tout aussi risqué Thibault Leurs espions pourraient apprendre que nous sommes ici ou partis pour les attendre au col

— Seigneur guerrier ? Quelqu’un demande à vous parler Il attendra en cuisines.

L’aubergiste se tenait immobile à un pas de leur table et avait parlé à voix basse.

L’attitude de l’homme n’échappa pas à Conan. Leur hôte semblait vouloir rester le plus discret possible. Il laissa donc Pardos retourner à ses occupations sans lui poser de questions, lui répondant d’un simple signe de tête affirmatif.

Launis avait été rapide mais son geste désespéré.

Ses mains crispées sur celle de Lugos, pour tenter de lui arracher la dague n’avaient même pas pu faire bouger celle du colosse. La punition avait suivi cette pitoyable tentative d’attaque.

Une gifle monumentale coucha Launis sur la paillasse.

— Maudite femelle ! Cette fois ton joli cul ne te sauvera pas ! Je vais te mettre les tripes à l’air !

La colère empourprait la face de l’esclavagiste et il se recula de Tabatha pour s’approcher de la guérisseuse évanouie. Déjà sa main armée de la lame se relevait

— JE VOUS EN PRIE NON !

Le regard mauvais se reporta sur Tabatha mais la dague restait suspendue au-dessus du ventre de Launis. Tabatha vint se coller à l’homme et sa main s’empara du sexe toujours dur de Lugos, le caressant aussitôt.

— Laissez-la tranquille Je vais obéir ! Je ferai tout ce que vous exigerez de moi

Sans attendre de réponse, Tabatha à genoux se baissa et son visage s’avança vers ce qu’elle caressait. La jeune femme ferma les yeux tout en posant ses lèvres sur le sexe tendu et mouillé. Un soupir de résignation et lentement elle avala une partie de la verge gonflée.

Puis elle fit aller et venir sa bouche sur la lourde tige comme elle l’avait fait avec sa main.

Tabatha suçait le sexe de l’esclavagiste comme elle avait vu Farla et Tully le faire.

De peur de mal s’y prendre et de raviver la rage de l’homme, elle s’appliquait au mieux. Pour faire bonne mesure et plaire à Lugos qui avait leurs vies entre ses mains, elle avalait le plus possible du membre avant de remonter ses lèvres sur le pieu de chair. 

Prenant soin de serrer les lèvres sur le sexe, Tabatha s’activait en espérant satisfaire son bourreau. 

Chaque fois, avant de laisser échapper le gland de sa douce prison, elle le léchait un moment et replongeait, lèvres serrées et descendant jusqu’à presque tout avaler de la queue dure.

Se souvenant de ce qu’il avait exigé un peu plus tôt, sa main gauche soupesa les testicules de l’homme avant de les caresser doucement. Lugos avait repris les cheveux de l’octroisienne entre ses doigts et sa main pesait sur sa tête, lui intimant d’aller plus loin, d’avaler plus encore de sa queue. 

Mais il la laissait remonter, semblant apprécier la caresse de sa langue sur son gland turgescent.

L’esclavagiste jouit sans un mot, éjaculant sur la langue, les lèvres et le visage de Tabatha qui n’eut pas le temps de réagir.

La forte main de l’homme appuya encore sur les cheveux de jais et Tabatha le visage maculé obéit, reprenant sa queue en bouche. Elle continua à sucer Lugos un moment se demandant quand le sexe de ce pourceau perdrait de sa dureté pour qu’il la laisse ne paix.

La jeune femme n’y connaissait rien mais le rire de Lugos lui apprit que lui-même en était surpris.

— Sacrée princesse ! Tu m’excites tellement que ma queue ne débande pas C’est peut-être déjà arrivé mais je n’en ai pas souvenance. Tu es peut-être une princesse de sang mais tu suces comme une reine !

Il consentit à accéder à la demande de la jeune femme à condition qu’elle fasse vite et qu’elle revienne s’occuper de lui et Tabatha s’intéressa à la malheureuse guérisseuse.

Launis avait la joue tuméfiée, l’il droit gonflé et d’un bleu verdâtre. 

Sa lèvre inférieure s’était ouverte sous le choc et du sang maculait son menton et avait coulé sur sa gorge. Elle n’avait pas repris connaissance mais gémissait sous la main de Tabatha qui passait de l’eau sur son visage pour laver ses plaies.

Lugos maugréa que cette salope attendrait le lendemain pour être soignée. L’insistance de Tabatha lui fit prendre un ton colérique.

— Tu suces très bien princesse mais reste à ta place d’esclave ! La guérisseuse m’aurait tué si elle l’avait pu ! C’est du fouet et non des soins qu’elle aura demain si tu insistes !

L’esclavagiste tapota la paillasse à ses côtés d’une main ferme.

— Viens sucer ton maître et m’offrir ton cul !

Lugos avait répété plusieurs fois qu’il n’avait pas bandé aussi fort depuis des années. Tabatha était prête à tout endurer mais l’homme se contentait de sa bouche. 

Il ne l’avait pas touché et se laissait aller en l’encourageant ou lui intimant des ordres.

Lugos gardait sa dague dans sa main gauche et la droite sur la nuque de la jeune femme, dirigeait Tabatha sur sa queue.

A genoux entre les cuisses de l’homme, Tabatha suçait un Lugos redevenu de meilleure humeur.

— Branle-moi doucement et lèche mes couilles princesse !

Tabatha obéissait sans réfléchir.

La honte et la colère revenaient par instants, la peur également mais ces sentiments étaient comme atténués. 

La jeune femme les éprouvait toujours mais aussi surprenant que cela puisse être, elle était comme soulagée de ce qui se passait.

Elle suçait ce porc et il la sodomiserait certainement mais elle était en vie.

Ses amies étaient en vie et personne ne souffrirait plus. Seul cela importait.

Comme si la queue de son maître n’avait pas seulement ouvert ses lèvres. Comme si ce qu’il l’avait forcé à faire lui avait ouvert l’esprit.

Son but initial avait été de tout accepter pour rester en vie et de tuer Lugos à la première occasion. Les circonstances lui avaient données l’espoir d’éviter certaines souffrances.

Tabatha abandonnait tout espoir de garder son corps indemne mais conservait en tête la finalité du but à atteindre. Vivre et tuer cette ordure.

Tully avait laissée Farla seule pour venir passer la nuit avec Tabatha. Elle avait envie de la belle octroisienne et Farla était fatiguée par ses dernières nuits de veilles auprès de la malade. Tabatha ne résistait jamais longtemps et Tully en imaginant sa bouche sur le sexe de la jeune femme avait senti monter une onde de désir dans son ventre.

Elle espérait que Tabatha finirait par craquer et l’imiter dans les jeux de l’amour.

Des images de Tabatha la léchant et la doigtant l’avaient rendue mouillée.

Elle mourait d’envie que la jeune femme brune la fasse enfin crier de plaisir.

Tully resta silencieuse devant la scène.

La vue de Launis inconsciente et le visage tuméfié lui fit l’effet d’un seau d’eau en plein visage. 

La poitrine de la guérisseuse se soulevant régulièrement la rassurant néanmoins. Quoi qu’elle ait fait, Lugos lui avait laissé la vie sauve.

Tabatha nue, à genoux et satisfaisant la lubricité de son maître de la bouche lui apprit que la situation avait changé et cela lui fit peur. Qu’avait-il pu se passer ?

La femme noire toussota nerveusement

— Ah Tully ! Tu tombes bien A poil ma belle et vite !

Tabatha ne s’était pas retourné sur elle, signe qu’elle avait peur. Et Tabatha ne s’effarouchait pas facilement. Il s’était passé quelque chose de grave mais Tully connaissait assez son maître pour savoir qu’elle n’apprendrait rien en posant des questions. L’esclavagiste n’était plus en colère et pour l’instant, c’était la seule chose qui comptait.

Elle se débarrassa de son léger manteau de peau de daim, qu’elle déposa sur un coffre bas et fit glisser les bretelles de sa tunique sur ses épaules pour se mettre nue. Le tissu resta un instant bloqué par les énormes seins fermes et la femme du insister en tirant plus fort pour que le vêtement glisse sur son corps.

La tunique alla rejoindre le manteau et Tully alla s’agenouiller aux côtés de sa nouvelle amie, attendant les ordres de Lugos.

— Lèche-moi le cul princesse !

Regarder Tabatha enfouir son visage contre les fesses de Lugos sans qu’elle n’objecte fit passer un frisson glacé dans le dos de l’esclave noire. Lugos se caressait doucement tandis que la jeune femme lui obéissait.

— oLèche notre princesse ma belle négresse ! Mouille bien son petit trou Je vais sodomiser son joli cul et sûrement le tien ensuite.

Le prêtre de Karth buvait une coupe de vin chaud et une odeur d’épices flottait dans l’air. C’était là que Pardos et les siens se restauraient où passaient un moment tranquille aux heures creuses.

La petite pièce attenante à la vaste cuisine de l’auberge sentait le vin et la cannelle.

Le prêtre souriait et désigna d’un geste le banc libre face au sien. Conan s’installa à la table mais Thibault préféra s’adosser au mur de pierre.

— oVous désiriez nous parler prêtre ?

L’homme fit le signe de Karth et cette formalité accomplie, sourit à Conan et servi du vin chaud dans deux coupes vides. Puis il leva la sienne et but.

— En effet j’ai demandé à vous parler. Je m’appelle Rich

La phrase en suspens et le regard de l’homme attendait des présentations.

Conan se nomma et présenta Thibault comme le chef du Tregont qui bivouaquait non loin du bourg.

Le prêtre était d’un âge avancé mais ses yeux pétillaient de malice et il paraissait sourire en permanence.

— J’ai entendu ce que vous disiez et si je vous trouve fort peu discrets, votre indiscrétion ou plutôt votre imprudence pourra peut-être servir vos desseins.

Conan exhala un profond soupir mais décida qu’il n’avait pas à se justifier. Le prêtre avait parfaitement raison mais les circonstances les avaient pris de cours.

— Nous vous écoutons prêtre Rich Ne perdez pas de vue qu’une imprudence peut-être vite réparée.

Rich passa du sourire au rire et termina sa coupe d’un trait.

— Menacer un prêtre de Karth Qui oserait le faire à part un guerrier ! Mais baste

Rich s’appuya des coudes sur la table et fixa Conan de ses yeux rieurs.

— Vous avez été imprudents c’est un fait Ce qui ne me regarde en rien c’est également un fait. Cette histoire de femmes d’Octroi capturées et destinées à l’esclavage ne regarde en rien un prêtre. Un autre fait avéré. Et cette caravane que vous recherchez Qu’ai-je à en faire ?

— Il est vrai que les clergés, quels dieux ou déesses ils servent et notre caste, ne font pas bon ménage. Une chose est sûre pourtant, les serviteurs de Karth ne parlent pas et surtout n’agissent jamais sans raison Une bonne raison !

Thibault avait retiré de sa bouche le copeau de bois qu’il avait taillé pour se curer les dents et souriait lui aussi. Un sourire froid qui n’avait rien à voir avec celui de son interlocuteur.

Rich approuva de la tête souriant de plus belle.

— C’est tout à fait exact frère guerrier ! Il nous faut toujours une très bonne raison pour nous mêler d’autres problèmes que ceux de religion.

Le prêtre reversa du vin à Conan et proposa la cruche à Thibault qui refusa de la tête.

— Je suis un enfant de Karth depuis cinquante-trois saisons voyez-vous J’ai vu passer soixante-huit saisons et je n’en verrai plus beaucoup d’autres. Un vieux prêtre fatigué, voilà ce que je suis aujourd’hui

Rich sourit encore et but une nouvelle gorgée de son vin.

— Mais j’ai été un enfant et un jeune homme Un enfant qui a eu le malheur de perdre sa mère très tôt mais qui a eu la chance d’avoir une merveilleuse femme comme grand-mère. Et cette grand-mère racontait des contes et des histoires à cet enfant Et un jour, estimant que l’enfant pourrait comprendre, elle lui raconta sa vie. Une vie d’esclavage avant qu’elle puisse enfin s’enfuir et retrouver une liberté et une vie digne de ce nom. Cette femme devenue une mère puis une mère-grand avait été une enfant volée à sa vie par des hommes abjects, traitant les personnes comme ils n’auraient pas traités leurs animaux. Elle raconta sans rien omettre et dans toute son horreur plus d’une vingtaine d’années d’une vie misérable Une histoire d’esclave parmi tant d’autres pires encore que la sienne et que précisa-t-elle, je ne devais jamais oublier.

Le prêtre semblait plongé dans ses souvenirs mais il savait narrer et Conan ne l’avait pas interrompu. Le guerrier attendait d’en savoir plus. Rich ne s’épanchait pas sur sa vie sans avoir un but ou une affaire à proposer.

Un soupir et un nouveau sourire et le vieil homme reprit son histoire.

— Je me souviens l’avoir vu nue un jour Elle changeait de robe pour la moisson Le corps d’une vieille femme certes Mais son dos Ses fesses Ce n’étaient que chairs boursoufflées et balafrées. Ne l’ayant vue que de dos, je suis cependant persuadé que le reste de son corps n’était pas épargné. J’ai compris ce jour-là pourquoi elle avait tant adoré l’homme qui l’avait prise en épousailles…

— Une bien triste histoire prêtre

Conan était sincère mais s’impatientait et le prêtre le comprit. Il désigna du doigt la sacoche de cuir posée sur la table avant de la prendre et d’en ouvrir le rabat. Les vieilles mains en extirpèrent un parchemin roulé.

— Ce qui est inscrit sur ce parchemin sont les biens de Karth Et je les gère en tant que prêtre. Un prêtre n’agira que dans l’intérêt de son clergé. Mais l’homme lui Peut agir pour lui-même.

Rich hochait la tête sans plus sourire, les yeux dans le vague et Conan regarda Thibault qui lui fit signe qu’il ne comprenait pas plus que lui ce qu’avait voulu dire le vieillard. Mais Rich se secouait déjà et son ton jovial avait repris le dessus.

— Trois charrettes légères Trois chevaux Six mulesDouze robes de prêtres Livres de prières et autres ustensiles de prêtres. Futailles, vivres, avoines et d’autres choses Bref ! cette liste équivaut à un peu plus de douze pièces d’or. Les deux autres frères et moi allions nous installer à Perchefeux. Un peu plus au Nord L’idéal étant que vous ayez cet or

Le regard de Conan était assez explicite pour que le prêtre secoue doucement la tête.

— Un prêt donc Votre parole que tout nous sera restitué pertes

— Ni or ni promesse prêtre Tout peut brûler ou être détruit

Rich sourit mais cette fois sans joie aucune.

— Une réquisition J’ai eu la bêtise de parler de vous aider avec mes frères et ils ne sont pas d’accord mais Je suis leur supérieur. Si je perds tout, mon imprudence sera punie comme une maladresse et non comme une trahison envers Karth.

— Pas question que vous ayez des ennuis

— Ramenez tout si vous le pouvez ! J’attendrai de vos nouvelles ici même. Sans nouvelles de vous sous quinzaine, je conclurai que vous êtes morts. Et j’aviserai

Rich secoua la cruche vide avec une moue de dépit.

— Karth juge que j’ai assez bu

Le vieux prêtre prit son temps pour déplier son corps noueux et se lever de table.

 

— Un bon pèlerinage mes frères ! Et sur la voie qui vous mènera à Karth, évitez les guerriers d’Octroi Ce n’est que racailles et fiers à bras incultes. 

Il tendit la besace à Conan qui s’était lui aussi levé. Le guerrier la prit et la soupesa d’un air songeur.

— Elle devait être une femme exceptionnelle

— Elle m’avait avoué que les séquelles de sa vie d’esclave n’avait pas été faciles à éliminer

Le prêtre tendit son bras et Conan et lui se serrèrent la main. Thibault les rejoignit et fit de même, remerciant Rich de la confiance qu’il leur témoignait.

— J’espère vous rendre le tout S’il y a des pertes je ferai mon possible avec le trésorier de la citadelle pour vous dédommager au mieux.

— Les pèlerins de Karth font partie du paysage. Soyez tout de même prudents et revenez en vie. Et envoyez le plus possible de ces chiens rejoindre le dieu passeur Je ne devrais pas parler ainsi mais je n’ai pas oublié les yeux de ma grand-mère quand elle racontait sa vie d’esclaves. Ni ses larmes

Une fois seuls, les deux guerriers tinrent conseil. Le plan serait donc axé sur l’effet de surprise. Conan prendrait la moitié du Tregont avec lui. Ils seraient les pèlerins du dieu passeur et s’aventureraient à la recherche des esclavagistes. La couverture était excellente et l’effet de surprise serait total à la condition de trouver la caravane.

Thibault lui, attendrait au col

Une fois le convoi de femmes retrouvé, Conan serait seul à décider de la possibilité d’une attaque ou de suivre discrètement les esclavagistes jusqu’au col.

Si malgré les informations des deux prisonniers Conan ne retrouvait pas le convoi, ses hommes et lui pourraient peut-être faire demi-tour et retrouver Thibault au col à temps pour intercepter ces ordures d’esclavagistes.

— Je t’enverrai un pigeon pour que tu saches que nous avons retrouvé les femmes. Un autre pour te prévenir de ce que nous prévoyons de faire. Je n’attaquerai que si la situation l’exige ! Ou si une opportunité d’éliminer un grand nombre de gardes s’offre à nous sans trop de risques.

— Les arbalètes seront cruciales si tu attaques Ne foncez pas tête baissée et éliminez le plus de ces fumiers avec vos carreaux avant de les combattre au corps à corps.

Conan en termina de sa coupe de vin et quitta le banc d’un mouvement souple.

— Je vais rejoindre les hommes. Nous reviendrons chercher les charrettes et tout l’attirail de Rich et nous partirons aussitôt. Avec de la chance nous aurons trouvé la caravane en fin de matinée.

— Que Vornia te sourit mon frère !

— Qu’elle sourit à tous !

Conan venait d’enfiler sa légère cuirasse de cuir et sanglait les fourreaux dorsaux de ses épées.

— Profite du reste de ta nuit mon frère Et de Vanesse !

— Elle te racontera mes prouesses une prochaine nuit et tu devras te surpasser pour qu’elle m’oublie.

Conan souriait en serrant l’avant-bras de Thibault d’une poigne solide. Un dernier adieu et le guerrier quittait l’auberge pour le bivouac du Trégont.

La lune voilée par le brouillard ne laissait filtrer qu’une lueur faiblarde et la forêt était plongée dans une épaisse obscurité. 

Les loups eux-mêmes semblaient avoir déserté leurs terrains de chasse pour rester tranquillement dans leurs tanières. L’air froid faisait sortir des volutes de buée des bouches des voyageurs quand ils exhalaient et tous paraissaient engourdis par le froid vif qui pesait sur ce début de nuit.

Le prêtre de Karth qui montait un cheval de trait au pas lourd semblait s’être affalé sur la selle de sa monture. Devant lui, deux autres prêtres munis de torches ouvraient la marche. Les autres serviteurs du dieu passeur menaient charrettes et mules sur un petit chemin caillouteux.

Tous étaient silencieux et seul le martèlement des sabots des bêtes résonnait dans la nuit.

Les armes, dagues, épées, carquois de carreaux et arbalètes avaient été emmaillotées de linges, laines et autre tissus pour éviter qu’un cliquetis métallique ne trahisse leurs présences. Les guerriers jouaient leurs rôles même si personne ne pouvaient encore les voir.

— Alors Karth approcha la pince sacrée de ses lèvres et souffla sur une braise ardente enlevée du foyer. Et l’âme quitta le corps du défunt pour gagner le passage pour le royaume de Karth

Le prêtre à cheval tenait un lourd cierge allumé et l’avait approché du livre sacré pour s’aider à la lecture. Il avait lu le passage d’une voix grave qui couvrait le bruit des bêtes et des charrettes.

— Alors le passage pour le royaume fut emplit de la lumière de Karth. Et la lumière. devint éblouissante et l’âme purifiée Gloire à Karth !

— Gloire à Karth ! Gloire au dieu passeur !

Tous les autres prêtres avaient parlé d’une voix forte et on sentait la sincérité de leurs prières. Rich avait été un enseignant efficace et en quelques instants seulement.

Deux lectures de Conan engendraient la sempiternelle réponse du reste des guerriers. Simple mais d’un ennui mortel 

Lire ces passages agaçait Conan mais c’était ainsi que voyageaient les serviteurs du dieu. Rich avait été clair.

Jouer le jeu en pleine nuit, en pleine forêt déserte était certainement un excès de prudence mais un seul espion les entendant à cet instant précis serait un espion rassuré et convaincu qu’ils étaient bien ce qu’ils représentaient.

— L’âme était purifiée par la lumière de Karth. Et l’âme purifiée attendait. Et un nouveau corps naquit des entrailles d’une mère.

Conan laissa passer un temps avant de lire la suite du texte religieux. Il ne croyait pas aux dieux. Il n’y avait pas vraiment cru enfant et avait abandonné tout espoir dans la religion un peu après être entré à l’école des guerriers. Vornia au moins ne les obligeait à rien d’autre qu’à se battre et n’exigeait rien de plus de ses fils.

— Et le nouveau corps était pur et l’âme purifiée par Karth en prit possession. Et le corps pur et l’âme purifiée s’unirent. Un nouveau-né qui deviendrait un enfant. Un enfant qui deviendrait un homme. Un homme qui reconnaitrait la gloire de Karth. Un nouveau serviteur de Karth !

— Gloire à Karth ! Gloire au dieu passeur !

Un loup hurla et Conan regarda le ciel. 

La lune trouait maintenant les ténèbres, signe que les brumes reculaient. Une belle nuit s’annonçait qui laissait espérer une aurore sans brouillard et une journée à venir sans pluie.

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