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Les faiseurs de Trans – Chapitre 4

Les faiseurs de Trans - Chapitre 4



Chapitre 4 : Quelques années plus tard

Marbella, sud de l’Espagne, début juillet. Depuis la terrasse de notre somptueux appartement, je regarde le Soleil descendre vers l’horizon. Mon déshabillé volette dans le petit vent, joue avec mes cheveux longs. La journée a été chaude, la nuit va être torride. Nous avons un contrat pour animer une soirée à Torre Molinos. Il y aura du beau monde parait-il : vedettes du show-biz, cinéastes, industriels, patrons de banque, des princes et des émirs du golfe et d’ailleurs, bref tout le gratin doré en vacances dans la région.

–    Aline, la salle de bain est libre.

–    J’arrive Laurence.

–    Attend, me dit-elle. Feuille, pierre, ciseau ! Un, deux, trois J’ai gagné ! On prend la Porsche !

Je ne sais pas comment elle fait, elle gagne souvent. Elle me connait trop bien. Elle adore la Porsche, cadeau d’un grand patron d’une firme automobile allemande tellement on l’avait satisfait ce soir-là. Moi je préfère la Ferrari, que nous a abandonnée un émir du golfe une fois ou on a failli le faire mourir de plaisir. Je la trouve plus féminine. Sinon, pour tous les jours, on a acheté une A8. Pour nous deux c’est bien suffisant.

Je commence par me brosser les cheveux. Avec un brin de mélancolie, je contemple dans le miroir l’image de la superbe jeune femme que je suis devenue. Je suis une trans. La clinique de l’association a fait du beau boulot. A coups de médocs et de chirurgie, elle a terminé ce que les petites pilules de Doc avait initié et que Carlos avait accompli. Là-bas, j’y ai retrouvé Laurent. Je suis devenue Aline, elle est devenue Laurence. Par notre sérieux, notre application et notre talent, nous sommes devenues parmi les travesties les plus recherchées de la Costa Del Sol.

Tout en me maquillant, mes pensées dérivent sur ce que nous avons vécu. Ah, ils nous ont bien eues J’ai tout compris ce jour à la clinique, ou par curiosité j’ai examiné mon sperme avec un microscope qui trainait là et vu mes spermatozoïdes parfaitement actifs. Ils nous ont menti, tous, Doc, Carlos, Véro, Monica, Juan menti, manipulés, on n’avait aucune chance. Doc était le «chasseur». Il était chargé de détecter dans sa zone les jeunes garçons potentiellement efféminés, avec des familles décomposées, fragiles émotionnellement et facilement influençables, et de bloquer leur développement masculin à la puberté. Puis il les amenait à Carlos et ses semblables qui par hormonothérapie enclenchait le processus de féminisation, en plus de petites pilules bleues cachées sous l’aspect innocent de bonbons gomme afin de maintenir notre libido intacte. Cocktail détonnant Une fois atteint un certain niveau de transformation, on était piégés, coincés, paumés, sans repères, il ne leur restait plus qu’à nous raconter des salades pour que nous acceptions de rejoindre l’association.

A la clinique on nous a peu à peu entrainés vers notre futur métier, c’est-à-dire, devenir des travestis de luxe, destinés à donner du plaisir à la haute société dépravée et pleine aux as. Et sur ce plan au moins Carlos ne nous a pas menti, nous avons été bien formées. J’ai passé mes diplômes, appris les bases de la physiologie et de la médecine, appris basiquement espagnol, anglais, français, russe, arabe… même le japonais. C’est mieux compte tenu de la diversité de la clientèle On nous a appris à nous comporter en femmes raffinées, sexy et élégantes, et initiées à toutes les techniques sexuelles possibles afin de donner le maximum de plaisir à nos clients. De la dominatrice la plus perverse à la soumise la plus docile, tout y est passé, du simple massage érotique au sado-maso le plus hard en passant par le crade, les sextoys, la zoo et j’en passe. Rien n’a été oublié.

Oh, tout n’a pas été rose et plusieurs on craquées, n’ont pas été au bout de leur formation. Certaines sont retournées à une vie «civile» et Carlos avait raison sur ce point, leur vie n’a rien de drôle. Il y en a qui sont tombées dans la prostitution bas de gamme, dans l’alcoolisme, la drogue. Il y a eu des cas de suicides. Aucune n’a osé aller se plaindre, elles savaient trop ce qu’elles risquaient ! Et à qui d’ailleurs ? L’association a des ramifications au sein de toutes les polices Laurence et moi avons décidé de faire preuve de pragmatisme. Ou de soumission, c’est selon le point de vue. Nous avons considéré que perdues pour perdues, autant s’en tirer le moins mal possible.

Nous ne sommes pas non plus malheureuses. Nous voyons du beau monde, nous vivons dans un certain luxe. Nous sommes très bien payées, à l’aise financièrement. L’association nous bichonne, fais attention à nous car nous représentons un gros investissement à ne pas gâcher. On est même libre des se faire des extras lorsque nous n’avons pas d’engagement prévu. Et elle nous fait confiance au point de nous confier des missions spéciales. L’appartement est à nous. Nous l’avons payé de nos fonds propre, tout comme l’A8. A Marbella. C’est dire.

–    Aline, tu peux voir si je suis bien comme il faut ?

Je sursaute. C’est Maria. Une des missions spéciales. C’est une jeune trans qui termine sa formation à la clinique. L’association nous l’a confiée pendant deux mois, en stage si l’on peut dire, pour l’évaluer et corriger ses derniers défauts avant de la lâcher dans le grand bain. Je lui souris. Elle est très douée, très cochonne et très experte malgré son manque de pratique. Nul doute qu’elle va faire un malheur dans quelques mois. Je rectifie un ou deux points de son maquillage.

–    Laurence te fait dire qu’elle est prête

–    J’y suis presque, j’enfile ma robe et j’arrive.

Je finis de m’habiller, me met un dernier coup de brosse. Je prends ma pochette, j’y met quelques petites pilules bleues, tant pour nous parce qu’il faut bien tenir la distance, que pour les fêtards qui auront peut-être besoin d’un petit peu plus qu’un coup de main. Je vérifie que mon petit pistolet s’y trouve bien et qu’il est chargé. Dans notre métier, il vaut mieux être prudentes. Il arrive qu’on tombe sur des drôles de cocos qui ne respectent pas les règles. Ca les calme.

On a parlé avec Laurence de ce qu’on fera plus tard, quand notre carrière aura avancé dans le temps. On aimerait ouvrir une maison, avec des filles, des trans, pourquoi pas des hommes ? Il y a tellement de demande. Pour l’instant, nous vivons au rythme des soirées chaudes, là ou le luxe, l’argent, et l’alcool coulent à flot.

Mais tout n’est pas forcément si rose. Parfois, la nostalgie de notre vie passée, de ce que notre vie aurait dû être nous rattrape. On a des coups de déprime, on pleure parfois… Alors on se soutient, on se cajole, on se câline, on se bizouille, souvent on fait l’amour. Et notre vie suit son cours au fil des mois.

Je ne suis jamais retournée à Bayonne. Je ne pourrai pas. La perspective de me retrouver un jour devant mes parents me terrifie. Comment pourrais-je me montrer devant eux, moi, leur petit garçon, comment oserais-je leur montrer  ce que je suis devenue ?  Et puis même si je décidais de le faire, notre contrat nous l’interdit. Trop risqué. Et on ne plaisante pas avec les interdits dans l’association. Vous vous souvenez de Stéphane qui faisait partie des petits cochons ? Il était très intelligent, très observateur. Lui avait compris ce qui se passait, ce qu’on était en train de nous faire. Que s’est-il passé alors ? A t-il voulu parler ? A t-il été liquidé ou s’est-il suicidé ? Je ne le saurai peut-être jamais. Je sais que mes parents m’ont cherché longtemps. Ils ont mis des affiches, lancé des appels à témoin sans résultats. Et l’enquête n’a rien donné. Seul point positif, l’épreuve a fait que leur couple s’est reformé.

La fameuse clinique n’a jamais été inquiétée. Trop de gens, trop de personnalités y sont impliquées et y trouvent leur compte : des membres de la police, des banquiers, des juges, des politiciens de tout poil, des avocats véreux, des hommes d’affaires corrompus, des députés, des ministres, des trafiquants de tous bord, des gouverneurs de province, des parrains, et même murmure-t-on jusque dans les familles princières. Et elle continue à produire mois après mois les travestis de luxe dont les puissants se délectent.

Je n’ai jamais revu non plus Carlos. Malgré ses fonctions et les protections locales dont il bénéficiait, la police a commencé sérieusement à s’intéresser à lui. Il devenait gênant pour beaucoup de monde, et un matin on a retrouvé son corps criblé de balles au fond de sa piscine. Son entourage a eu de chances. Véronique s’est éclipsée de justesse et au dernière nouvelles elle ferait le tapin quelque part du coté de Rome. Juan et Monica sont prudemment retournés dans leur pays d’origine. La police française aimerait bien les interroger, mais il y a peu de chance que la requête aboutisse.

Par contre j’ai revu Doc. C’était il y a quelques mois, un soir dans un bar du coté de Barcelone. Il ne m’a pas reconnue. Alors je l’ai dragué, je l’ai allumé, je lui ai proposé un petit coup vite fait et il a accepté. Alors je l’ai entrainé dans une ruelle derrière le bar et là, je lui ai logé deux balles dans la tète.

Fin.

ou début d’autres aventures ?

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